Opioïdes : Comprendre et agir pour éviter la crise

Des élus se mobilisent !

« On ne pleure pas devant des chiffres ». Cette célèbre – et ô combien réaliste ! – phrase de l’Abbé Pierre illustre parfaitement la problématique des actions politiques et de leurs enjeux, notamment dans le cadre qui nous intéresse ici – prévenir une « crise des opioïdes » en France.

 

La réalité du terrain se confronte aux enjeux politiques

Il nous arrive de penser que les personnalités politiques, nos élus, le gouvernement ou l’administration sont éloignées des préoccupations du terrain qu’ils ne prennent pas en compte les attentes de la population. Et, surtout, le reproche que l’on entend le plus souvent est que seul l’aspect financier est réellement pris en compte lors des arrêtés et prises de décision du gouvernement.

C’est oublier un peu vite que nos élus sont aussi, et avant tout, des êtres humains. Et qu’eux aussi, comme vous, comme nous, ont une famille, des proches dont certains peuvent être douloureusement confrontés à un risque d’overdose d’opiacés.

Car ce type d’addiction, rappelons-le, n’est pas l’apanage des junkies tels qu’on se les représente généralement. Ces drogués-là se croisent dans nos salles de réunion et au restaurant, ils portent aussi bien le costume-cravate que le bleu de travail ; l’addiction aux opioïdes touche toutes les classes sociales, sans distinction.

Un problème de santé publique avant tout

Alors, bien sûr, les gouvernements raisonnent en termes de budget. Notre but n’est pas de faire un laïus sur le monde de la politique ! Mais de montrer que, oui, il existe des élus qui « se bougent » et font avancer les choses pour réduire les risques d’addiction aux opioïdes et faciliter la prise en charge des patients.

Car il s’agit bien d’un problème majeur de santé publique !

Ainsi, l’arrêté du 31 juillet 2019 fixe l’objectif suivant : « L’accompagnement et la prise en charge des patients avec des problématiques addictives en lien avec les opioïdes fait partie des orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu pour les années 2020 à 2022. »

Les enjeux sont autant humains qu’économiques.

C’est pourquoi le ministère chargé de la santé a élaboré une feuille de route intitulée « Prévenir et agir face aux surdoses d’opioïdes » : le but est de faciliter et garantir l’accessibilité des médicaments opioïdes à toute personne qui en a besoin, tout en sécurisant au mieux leur utilisation, sur la période 2019-2022.

Concrètement, vous avez des élus qui, chaque jour, se battent pour améliorer la prise en charge des patients à risque.

Voici, en exemple, la question d’une députée à l’Assemblée nationale : « Mme George Pau-Langevin attire l’attention de Mme la ministre des Solidarités et de la Santé sur la prescription de produits de substitution pour dépendance à certaines drogues(…). Pour le médecin, la prescription de ce médicament peut être source d’inquiétudes, car refuser de le faire s’avère conflictuel et l’oblige à gérer avec doigté le patient qui peut se révéler violent. Par ailleurs, cette prescription ne va pas sans générer une clientèle sociale particulière, qui peut faire fuir la clientèle moins en phase avec cette problématique. Dans les faits, le médecin de ville se retrouve pris en étau, entre l’autorisation de prescrire ce type de médicament, avec toutefois un risque d’être sanctionné s’il est estimé qu’il en prescrit trop, et l’obligation de gérer ces patients tout en étant vigilant par rapport au traficqui peut s’organiser autour de ce produit. Elle l’interroge en conséquence pour savoir quelles orientations son ministère fournit aux professionnels pour encadrer la prescription de ce type de médicaments et donner aux médecins de ville les garanties nécessaires quant à l’exercice de ses missions. »

Ainsi, cette élue expose une problématique concrète – ou plutôt, plusieurs problématiques : les difficultés rencontrées par les praticiens lors de la délivrance d’opiacés.

Le mésusage au centre des débats

Nous vous transcrivons une partie de la réponse de la Ministre : « La politique de la France en matière de substitution aux opiacés se caractérise par une grande accessibilité des traitements de substitution aux opiacés (TSO) mise en place au milieu des années 90. Cette politique a connu un indéniable succès en permettant à de très nombreux usagers dépendants aux opioïdes de stabiliser et améliorer leur situation sur le plan sanitaire et social. (…) Cette bonne accessibilité des TSO a pour contrepartie de pouvoir être à l’origine d’une diffusion de ces molécules et d’un mésusage, voire d’un détournement d’une partie des prescriptions médicales. C’est pourquoi un certain nombre de mesures ont été prises au niveau national. La prescription (…) est strictement encadrée (…) »

Ici, la Ministre énumère les mesures d’encadrements à cette prescription : cette dernière « doit s’effectuer en toutes lettres, sur ordonnance sécurisée et ne peut dépasser 28 jours. La délivrance en pharmacie peut être fractionnée à 7 jours. La prise en charge par l’assurance maladie (…) est subordonnée à l’obligation faite au patient d’indiquer au prescripteur, à chaque prescription, le nom du pharmacien chargé de la délivrance et à l’obligation faite au médecin d’inscrire ce nom sur la prescription qui doit alors être exécutée par ce pharmacien. »

Après avoir détaillé les mesures d’encadrement des prescriptions d’opioïdes, la Ministre précise : « Dans ce cadre (NDR : celui de l’arrêté dont nous vous parlions plus haut), la Haute autorité de santé est en charge de l’élaboration de recommandations de bonnes pratiques, avec un volet sur les stratégies thérapeutiques pour les personnes dépendantes aux opioïdes. Ces recommandations ont vocation à appuyer les médecins généralistes, spécialistes, pharmaciens en particulier, dans la prise en charge de leurs patients. »

Il ne s’agit, bien sûr, que d’un exemple d’échanges à l’Assemblée Nationale ; il en existe des centaines… Mais cela montre la volonté et l’implication de beaucoup d’élus dans cette problématique ; ce qui est très encourageant !

L’Abbé Pierre avait raison : on ne pleure jamais devant des chiffres. Mais, du moins, peuvent-ils alerter les autorités et favoriser les actions…

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