Opioïdes : Comprendre et agir pour éviter la crise

Addiction aux médicaments : aider les patients à sortir du cauchemar

Connaissez-vous le craving ?

Il s’agit d’un anglicisme, évidemment, utilisé dans le monde médical pour définir « un désir intense et irrépressible de consommer une substance ». La persistance de ce besoin impérieux est corrélée au risque de rechute du trouble de l’usage de substance ».

C’est le symptôme phare de la dépendance.

Or, parmi toutes les substances susceptibles de provoquer, entre autres joyeuses conséquences, ce craving, ce sont les opioïdes.

Les troubles liés à l’addiction aux opioïdes sont nombreux et, souvent, très invalidants pour leurs victimes

Des conséquences physiques notables

Côté physique, on peut noter : somnolence, constipation, étourdissements, migraines, nausées, perte d’appétit ; mais aussi des éruptions cutanées, des difficultés à uriner et même à respirer

Une partie de plaisir, donc ! Sans compter tous les maux psychiques, comme l’anxiété, la sensation de confusion, les troubles du comportement

Les personnes « addict » aux médicaments opioïdes avouent souvent ne plus se reconnaître elles-mêmes et devenir agressives ou atones. Pour beaucoup de patients, c’est, véritablement, un « cauchemar sur ordonnance » !

Bien entendu, nous ne parlons que de l’addiction : les médicaments opioïdes que vous prenez temporairement pour atténuer une douleur ne génèrent pas ces symptômes, sauf cas exceptionnels.

C’est leur consommation addictive qui mène au cauchemar

On appelle cela le « trouble de l’usage : l’identification d’un modèle pathologique de comportements dans lequel les patients continuent à utiliser une substance malgré des problèmes (personnels, familiaux, socioprofessionnels, etc.) considérables liés à son utilisation. »

Les caractéristiques du trouble de l’usage

Il n’est pas forcément évident de diagnostiquer un TUO – trouble de l’usage d’opioïdes.

dans le cas d’une addiction aux médicaments opioïdes le signe le plus révélateur, pour un médecin, est lorsque le patient réclame une poursuite de son traitement antalgique opioide, alors que les douleurs pour lesquelles il l’avait traité auraient dû disparaître.

Or, cette alerte est parfois trop tardive et les praticiens ne sont pas tous bien formés à l’addictologie.

Il existe, officiellement, onze critères distincts pour établir un diagnostic de TUO sachant que 2 critères suffisent pour établir le diagnostic :

  1. Les prises sont souvent plus importantes ou pendant une période plus prolongée que prévu
  2. Le désir persistant ou les efforts infructueux, pour diminuer ou contrôler l’utilisation d’opioïdes
  3. Le temps passé à récupérer de leurs effets
  4. Le craving
  5. L’incapacité du patient à remplir ses obligationstravail, école, maison
  6. La prise d’opioïdes malgré des problèmes interpersonnels causés ou exacerbés par leurs effets
  7. Les activités sociales abandonnées ou réduites à cause de l’utilisation d’opioïdes
  8. La prise d’opioïdes dans des situations où cela peut être physiquement dangereux
  9. Poursuivre leur utilisation lors de problème psychologique ou physique persistant ou récurrent
  10. La tolérancebesoin de quantités plus fortes, effet diminué lors d’utilisation continue
  11. Le syndromes du sevrage, ou si les opioïdes sont pris pour soulager les symptômes de sevrage.

Une innovation structurelle à Lyon

Heureusement, la prise de conscience collective face à la « crise des opioïdes » pousse les professionnels à une meilleure prise en charge ; et des innovations prometteuses voient le jour.

En France, c’est à Lyon que l’une de ces innovations est née en 2022.

Le service d’addictologie de l’hôpital Edouard-Herriot s’est ainsi doté du tout nouveau Centre ressource lyonnaise des addictions médicamenteuses, le Cerlam.

Le Professeur Rolland, avec le soutien et le financement de l’ARS, a ainsi créé une équipe spécialisée dans l’accompagnement des patients « addicts sur ordonnance ».

Deux types d’addiction y sont pris en charge : celle aux médicaments opiacés ; et celles aux anxiolytiques de la famille des benzodiazépines, ou gabapentinoides.

Le Cerlam intervient à deux niveaux : l’aide au sevrage et la prévention.

 

Intervenir de la bonne manière au bon moment

Pour le premier point, l’originalité du Centre réside dans l’approche, aussi bien physiologique que psychologique : l’équipe médicale cherche, avec le patient, les causes profondes, inconscientes, qui ont mené à l’addiction médicamenteuse.

Car, comme tout type de comportement addictif, cela ne relève jamais d’un hasard. S’attaquer aussi bien aux symptômes qu’aux origines du mal…

Pour le second point, la prévention, le Cerlam a pour objectif de briser les tabous liés à la dépendance, et de créer des procédures simples, efficaces à destination des médecins et des professionnels de santé : plus la prise en charge des patients dépendants est rapide, plus leur chance de s’en sortir est grande.

Créer un réseau avec les pharmacies, les laboratoires, les praticiens, les centres antidouleur… est le meilleur moyen pour faire le repérage et de la prévention des risques liés à la dépendance aux médicaments opioïdes.

Et, bien sûr, accompagner la création d’autres centres pour essaimer à travers le pays !

Le Cerlam, en une année d’activité, a traité et accompagné soixante-quinze patients.

Le professeur Rolland, psychiatre addictologue et créateur du Cerlam, insiste sur l’importance de développer de telles structures.

Il souligne le fait que, si l’addiction médicamenteuse n’est pas nouvelle, son augmentation depuis ces dernières années est très inquiétante. À nouvelle donne, nouvelles réponses !

Car, derrière ces chiffres, il y a les drames humains qui pourraient, avec un accompagnement précoce et de qualité, être évités…

SOURCES

https://www.ouest-france.fr/sante/medicaments/un-cauchemar-addiction-aux-medicaments-un-centre-unique-en-france-a-lyon-c9c17cfa-03a0-11ee-bfa0-5e45e3198685

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2022-03/diagnostic_du_trouble_de_lusage_dopioides_-_fiche.pdf

https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/vie-saine/votre-sante-vous/aspect-medical/analgesiques-opioides.html

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